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Jeudi 18 octobre 1984, 10 h 30
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Date à vérifier. Le 17 octobre selon La Malédiction de la Vologne. Le PV pourtant dit le 18. Sans doute une erreur du reportage.
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Procès verbal de Jean-Marie Villemin
By Dana
Le 18 octobre 1984
Nous, Sesmat Étienne, capitaine, commandant la Compagnie de gendarmerie d'Épinal.
Nous trouvant à Bruyères au bureau de la Brigade de Gendarmerie faisons comparaître devant nous à sept heures le témoin ci-après nommé et lui donnons
connaissance des faits pour lesquels sa déposition est requise.
Après avoir prêté serment de dire toute la vérité, rien que la vérité, le témoin dépose ainsi qu'il suit :
Je me nomme Villemin, Jean-Marie, je suis né le 30 Septembre 1958 à Autmonzey (88). J'exerce la profession d'agent de maîtrise à l'entreprise Autocoussin à La Chapelle devant Bruyères (88). Je suis le père de la victime.
Je demeure 4 rue des Champs à Lépanges-sur-Vologne (88) depuis le 20 Janvier 1981. Auparavant, j'ai habité en H.L.M, de Septembre 78 à la date d'entrée dans ma saison individuelle. Je suis marié avec Blaise Christine depuis le 20 Janvier 1979.
Avant ce mariage, j'ai vécu 6 mois en concubinage avec elle. J'ai connu mon épouse en 1976 au cours d'une promenade à Laveline-devant-Bruyères (88).
Je travaille à l'usine Autocoussin depuis Octobre 1974. D'abord comme agent de fabrication jusqu'en 1977, date à laquelle j'ai effectué mon service national (3ème Génie Charleville-Mézières 08) Puis de février à septembre 78, j'ai repris mon poste en fabrication. J'ai ensuite travaillé au laboratoire jusqu'en février 1981. Je suis devenu agent de maîtrise à cette date. N'étant pas titulaire du C.A.P., j'ai bénéficié de la promotion interne. Actuellement, je travaille sur la chaine 2 (siège Renault) dans l'équipe de Saint-Dié. Je commande 18 à 20 ouvriers. J'entretiens de bons rapports avec mes supérieurs. Mon chef d'équipe Monsieur Henri, le sous-directeur
Monsieur Langin et mon directeur Monsieur Clavelier.
Je vais tout de suite vous parler de Monsieur et Madame Roger Jacquel qui ont travaillé dans cette usine. Madame Jacquel y est arrivée avant moi et elle y travaille encore comme agent de fabrication mais dans un autre service. Actuellement, c'est la seule personne de mon entourage familial qui me côtoie dans le travail. Monsieur Jacquel a travaillé de 74 à 77 dans le même service que moi. Nous étions alors tous les deux agents de fabrication et il n'y a eu aucun problème entre nous.
En revanche, mes rapports ont toujours été très tendus avec Madame Jacquel. Elle a un comportement qui n'est pas normal. Si on la regarde, elle tire la langue ou fait des singeries. Les anciens de la maison le savent bien. Jusqu'en 1981, on se disait bonjour, sans plus. En 1979, elle m'a vendu un poste de télévision noir et blanc pour la somme de 50 francs. Elle m'a demandé cette somme afin que sa fille Liliane ne fasse pas d'histoires.
Les problèmes ont commencé en juillet-août 1981. Je vous rappelle que j'ai occupé ma maison en juin 1981. Le téléphone a été installé en juillet mais je n'étais évidemment pas dans l'annuaire. Seule ma famille proche connaissait mon numéro de téléphone. Malgré cela, en août 1981 j'ai reçu au cours d'une nuit deux appels anonymes. La première fois, personne n'a parlé. La deuxième fois, j'ai entendu une musique (chanson de type sensuel) qu'accompagnait en chantonnant une femme.
J'ai pensé que c'était une farce. Ma femme a reçu par la suite d'autres appels souvent quand elle était seule.
En novembre 1981, au cours d'une nuit, quelqu'un est venu casser la porte d'entrée chez moi. J'étais au travail, ma femme était seule. A la suite de cela, je m'étais acheté une carabine 22 long rifle.
Des appels téléphoniques ultérieurs à mes parents ou à mon épouse ont fait allusion à des événements avec des détails très précis.
Les appels anonymes ont continué jusqu'en 1983, date à laquelle je me suis mis sur la liste rouge. Ce sont surtout mes parents qui en ont été victimes. Parfois, il s'agissait de menaces ou d'insultes, parfois de faux dérangements de tierces personnes (médecins garagistes, etc…). Personnellement, j'ai reçu deux appels téléphoniques : un chez moi que j'ai enregistré et dont vous avez la bande. Au cours de cet appel, on a fait notamment allusion à la position du « bâtard » (mon demi-frère Jacky) par rapport à moi, « le Chef ».
L'autre, je l'ai reçu en septembre 82 en soirée à mon travail. Mon collègue Poirot Francis qui a reçu l'appel pourra en témoigner. Cette communication a duré plus de trente minutes. Il s'agissait d'une personne à la voix rauque qui semblait avoir quelques difficultés respiratoires. Elle toussait.
Cette conversation, en voici dans les grandes lignes la teneur !
La voix anonyme : - Alors, le chef, t'es au boulot ? T'as pas peur de laisser ta femme toute seule ? Je vais sûrement descendre ce soir, t'auras des sur prises demain matin. Je vais écrire « Giscard » sur ton crépie t'arracher tous tes petits arbres.
Jean Marie : - Pourquoi tu ne t'en prends qu'à nous ?
- Je ne peux pas blairer les chefs.
- T’as qu'à venir, on va s'expliquer entre quatre yeux.
- Ce serait trop beau pour toi. Tu saurais trop vite qui je suis. Heureusement que ta vieille n'a pas marché dans le coup de l'accident, on l'attendait à la sortie de Deycimont (88) (NB : L'épouse avait reçu quelques jours avant un appel anonyme lui annonçant que Jean-Marie avait eu un accident et se trouvait à l'hôpital d'Epinal).
- Mais qu’est-ce que tu aurais fait ?
- On l'aurait violée.
- Tu m'as l'air bien poussif pour la violer.
- Je me contenterai de la tenir, le jeune fera le boulot.
- (Pour le narguer) je m'en fous, j'ai de l'argent, j'aurai une autre nénette.
- Espèce de salaud, je le dirai à ta femme, ça ne lui fera pas plaisir. De toute façon, je te mettrai une balle entre les deux épaules et, si je te loupe, je viendrai t'apporter des oranges à l'hôpital. Et puis, non, je m'en prendrai plutôt à ton gamin, ça vous fera plus de mal. Ne le laisse pas traîner, je le surveille avec des jumelles, si je le trouve, je l'embarque et tu le retrouveras en bas.
- Espèce de fumier, n'essaie pas de toucher au gamin !
- C'était pas la peine de téléphoner l'autre jour dans la nuit, j'ai reconnu ta voix.
(NB : Jean-Marie a téléphoné 8 jours au par avant vers 2 heures du matin d'une façon anonyme à Jacquel Roger).
- Ce n'est pas moi, tu te trompes. Mais si tu dis cela, c'est que t'es le Roger Jacquel.
- Mais t'es comme ta mère. Je ne peux pas être au bout du fil sans qu'on dise que c'est le Roger Jacquel.
- De toute façon, ça ne peut pas être un autre.
- (Très calme) ça dépend…
- Je vais te citer quatre noms, donne-moi ta parole que tu me diras si tu en un des quatre.
- Vas-y, je te la donne.
- Les Noel d'Aumontzey (surnommés les grêlés), Pascal Verdu de Granges, Marcel Jacob et Roger Jacquel.
- (Sans hésiter) Oui, il y en a un des quatre mais tu ne sauras jamais qui c'est.
- …
- Au fait, le chef, t'es bien copain maintenant avec le Jacky Gley (NB : Jean-Marie a eu en 78 des problèmes de relations personnelles avec ce chef du service entretien).
T'es bien aussi avec Thomas (un agent de maîtrise). T'es toujours avec. Tu te fais péter le cul.
La Liliane (épouse de Jacky Villemin, née Jacquel), quand elle descend chez ses beaux-parents, tes parents, elle se sent gênée si ta femme est là. Elle est toujours bien fringuée comme une pimbêche, il n' y en a que pour elle. Si la Liliane se plaint à sa belle-mère, celle-ci ne lui répond qu'en parlant de la Christine (épouse de Jean-Marie) et de la Marie-Christine, (épouse de Villemin Gilbert).
Tu vois bien que tu ne fous rien, ça fait 40 minutes que je t'ai au bout du fil.
Dans cette conversation, vous voyez bien que l'auteur du coup fil anonyme est bien au courant de notre situation familiale.
Ce sont surtout mes parents et ma femme qui ont reçu des appels mais la conversation tournait toujours autour de moi. En avril 1982, mon père a reçu un appel anonyme quelques jours après que ma porte d'entrée ait été casée. La personne faisait allusion à l'action commise ce soir-là de manière très précise. Je pense qu'il s'agit de la même personne. Il est possible qu'en fait il y eut deux personnes, peut-être même trois, dont au moins une femme.
Pour moi, cela ne fait aucun doute, il s'agit de la famille Jacquel, de Liliane et du Jacky. Beaucoup d’éléments me confortent dans mon opinion. En 79-80, par exemple, je sais que Jacky et Liliane ont voulu bâtir à Granges à l’époque où moi-même je bâtissais. En fait, leur projet a échoué car ils n'ont pas pu avoir
l'autorisation. Ils s'en sont trouvés aigris et jaloux à mon égard.
Je pense que le cerveau de toute cette affaire est la Liliane. Cette femme, je ne l'ai jamais aimée, elle a trop de caractère et veut toujours humilier les autres. Elle est comme son père, elle n'a pas froid aux yeux, elle ne se laisse pas faire. Elle dit beaucoup de méchancetés sur les autres membres de la famille.
Je me souviens qu'un jour en 73-74, alors que nous étions quelques personnes à jouer aux cartes (dont un copain, Colle Gérard dont les parents habitant à Autmonzey), elle a traité ma belle-sœur Ginette de « SALOPE » parce qu'elle partait seule en vacances avec trois garçons. Ginette est l'épouse de mon frère Michel. A l'époque, ils n'étaient encore que fiancés et sa réflexion était tout à fait injuste.
Pour montrer mon désaccord, je me suis levé et je suis parti : mon frère Jacky m'a rattrapé pour me calmer. Il était embêté par cette querelle. Mon frère est un faible, il se laisse manœuvrer par sa femme et sa belle-famille. Un jour, il a dit à quelqu'un : « Je ne veux pas embêter le Jean-Marie, j'en ai peur ».
En ce qui me concerne, je suis du genre à ne pas me laisser faire. Je sais que j'ai un tempérament qui peut être violent si on me cherche. J'emmerde personne mais je ne veux pas qu'on m’emmerde. Il m'est arrivé d'avoir à me battre avec d'autres personnes. J'ai fait du karaté pendant plusieurs années et, actuellement, depuis quelques mois, je pratique le culturisme.
Effectivement, j'ai de l'influence dans ma famille. Mon père m'écoute beaucoup, ma mère un peu moins.
Dans la conversation téléphonique que j'ai eue avec le correspondant anonyme à mon usine, j'ai effectivement avancé quatre noms. Celui des Jacquel, d'abord, je vous ai expliqué pourquoi. Celui des Noel d’Aumontzey ensuite, surnommés les « Grêlés » parce que d'une part ils habitent près de chez mes parents et qu'ils peuvent être au courant de nos problèmes familiaux, d'autre part parce qu'ils ont une très mauvaise réputation. Celui du Pascal Verdu ensuite, ce sont surtout mes parents qui l'ont soupçonné parce que sur une cassette, on entend, en arrière-plan, un enfant et qu'ils en ont un.
Par ailleurs, ce Pascal Verdu est très ami avec Jacky et Liliane. Les deux hommes travaillent dans la même filature. De ce fait, il pouvait être au courant de beaucoup de choses.
J'ai avancé enfin le non de Marcel Jacob d'Aumontzey pour plusieurs raisons.
D'abord parce que je sais qu'il est jaloux de la promotion dont j'ai bénéficié dans mon entreprise. Fin 82, je me souviens qu'il a eu une querelle avec mon frère Gilbert sur une route de Bruyères. Je suis intervenu pour les séparer. Quand je me suis approché, Marcel Jacob m’a tendu la main puis l’a retirée en disant « Je ne dis pas bonjour aux chefs. T'es qu'un rampant ! T'as pas de poils sur la poitrine ». Ces gens habitent à Aumontzey, je ne pense pas qu'ils aient des relations avec les Jacquel. Ils ont une fille de 15-16 ans, ce sont des gens assez agressifs et toujours très envieux.
Lui-même suit ou a suivi des cours du soir pour passer agent de maîtrise. Mais je crois que cela n'a pas marché. Il pourrait peut-être m’en vouloir pour cette raison.
En ce qui concerne mon demi-frère Jacky, j'ai appris, en 78, par mon frère Michel (qui le tenait de Cécile Jacob), que Jacky n'était pas le fils de notre père. Un jour, au cours d'une dispute entre eux, Michel l'a traité de « Bâtard ». Avant cette nouvelle, Jacky était très bien accepté dans la famille et j’entretenais d’excellents rapports avec lui. La situation s'est détériorée quand il a commencé à sortir avec Liliane
Jacquel, et à fréquenter la famille.
En 1983, Jacky et Liliane ont organisé chez eux une soirée choucroute : y ont assisté Noel Bernard et son épouse, Gilbert et son épouse, nos parents et nous-mêmes.
Michel avait refusé l'invitation. Quelques jours après cette soirée, mes parents ont reçu une lettre anonyme contenant des insultes et rapportant des faits précis sur cette soirée. Auparavant, en juin 82, j'avais invité Jacky et Liliane à une fondue chez nous. Nous étions quatre. Il y avait une bonne ambiance et nous avons beaucoup parlé. En septembre 82, nous avons reçu un coup de téléphone qui faisait allusion à cette soirée.
Depuis mai 83, à la suite de l'enquête effectuée par la gendarmerie de Corcieux au cours de laquelle des accusations réciproques ont été lancées, nous n'avons plus été embêtés. Nous n'avons plus reçu ni lettres ni appels, mes parents non plus.
Je sais que Jacky et Liliane pensent que le corbeau de toute cette affaire est l'André Jacob.
En ce qui concerne mon emploi du temps pour la journée du 16 : à 8 heures 20, j'ai amené mon fils à l'école, puis, jusqu'à 10 h, je suis allé faire du culturisme à Bruyères. Puis je suis rentré chez nous pour préparer le repas. À 13 h 30, mon épouse et mon fils sont rentrés et nous avons mangé. À 13 h 40, je suis parti à l'usine. Vers 17 h 30 - 17 h 40, j’ai reçu un coup de téléphone de ma mère me demandant de rentrer tout de suite parce qu'un malheur est arrivé. Le petit avait été enlevé. Je suis rentré chez moi, j'ai pris une carabine 22 long rifle avec un chargeur et je suis parti à Granges chez les Jacquel, car je pensais que mon fils était chez eux. Sur la route, j'ai croisé Michel avec mes parents, qui m'ont donné plus de renseignements sur
l'appel téléphonique. Je suis arrivé chez les Jacquel, vers 18 h 20. J'ai vu que les gendarmes étaient là, je me suis posté quelques minutes puis je suis rentré à Lépanges. Je me suis rendu à la mairie pour qu'on alerte les pompiers afin qu'ils commencent les recherches. On m'a prêté une torche et je me suis rendu avec mon père aux abords de la Vologne pour commencer les fouilles. Vers 21 h 15, on m'a appris la découverte de mon fils. A cette annonce, en rentrant chez moi, j'ai eu une réaction violente en tapant très violemment contre un volet avec ma main droite qui se trouve maintenant bandée.
Dans mon entourage, je suis appelé le CHEF surtout à l'usine depuis février 81, date à laquelle j'ai commencé à avoir des responsabilités. Personne dans la famille ne m'appelle particulièrement de cette façon.
Mon épouse travaille depuis 78 à la manufacture de confection de Lépanges. Elle gagne environ 3 500 francs par mois alors que moi-même, j'en gagne environ 8 000. Notre enfant, en dehors des heures scolaires, était gardé par madame Jacquot de Lépanges. Quand il était très jeune et que nous habitions en H.L.M., c'était déjà elle qui le gardait. Ensuite, quand nous sommes venus habiter notre maison
individuelle, nous l'avons confié à ma belle-mère à Bruyères. Pendant l'année scolaire 83-84, c'est Madame Leroy qui l'a gardé en dehors de la classe.
Je m'entends très bien avec mon épouse à tous points de vue.
Dans la lettre reçue le jour de la disparition de mon enfant, l'auteur parle de vengeance. Je ne vois aucun évènement qui se serait produit ces derniers temps et qui aurait motivé cet acte. Mais peut-être est-ce dû à l'agrandissement de ma maison que j'ai entrepris depuis quelques semaines. D'autre part, j'ai réussi à obtenir, ces derniers jours, des prêts très avantageux. J'en avais parlé à Michel dimanche dernier au cours d'une conversation.
Je ne vois également rien dans mon cadre de travail qui pourrait justifier une réaction de ce genre. Je me souviens maintenant qu'un jour, Liliane a dit à mon père que la vengeance est un plat qui se mange froid. J’ai de forts soupçons sur la famille Jacquel. Si ce n'est pas eux, je suis à peu près sûr que cela passe par eux et qu'ils savent qui sont les meurtriers.
J’ai peu d’amis intimes. Mes plus proches sont Bernard Noël et mon frère Gilbert. Je fréquente à un degré moindre mon frère Michel qui habite près de chez mes parents. Nous allons rarement chez lui car nous le rencontrons toujours chez eux. Je crois que Michel est un peu jaloux de moi. Il a parfois des réactions bizarres à son égard.
En ce qui concerne mes parents, c'est ma mère qui, dans le couple, prend les responsabilités. Mon père, lui, fait plus preuve de caractère, d'une façon parfois très catégorique.
Je vous remets un cahier écrit par ma mère, qui comporte tous les appels qu'elle a pu noter.
Le soir du crime, quand on m'a appris que Grégory avait été retrouvé dans la Vologne, accompagné du maire de Lépanges, je me suis rendu au local des pompiers de Docelles où son corps avait été déposé. J'ai formellement reconnu le corps de mon fils Grégory.
Je porte plainte à l'encontre du ou des meurtriers de mon enfant.
S.I. (sur interrogation) : Le terrain sur lequel j'ai construit était un terrain communal de trois parcelles dont j'ai obtenu la première et la meilleure. Mais je ne connais personne qui l'ai également convoité.
S.I. : Début 82, je suis allé voir une cartomancienne à Chavelot qui m’a dit que la personne qui m'avait cassé la porte était celle à laquelle je pensais, c’est-à-dire le Jacky.
S.I. : Le lendemain du jour où j'ai reçu le long appel téléphonique à l’usine, je me suis rendu à Granges chez le Jacky pour mettre les choses au point. Je leur ai dit que j'étais sûr qu'il s'agissait de Roger Jacquel. Liliane, alors, s’est mise à pleurer en disant que ce n'était pas possible mais qu'ils soupçonnaient une autre personne, à savoir André Jacob. Elle m’a alors donné une photo représentant le conseil municipal de Granges dont fait partie André Jacob, afin que je puisse présenter cette photo à ma voisine, madame Méline. J'ai présenté cette photo ainsi qu'une autre de Roger Jacquel, aux Méline et à un détective privé d’Epinal. Du point de vue taille, cela correspondait plutôt à Roger Jacquel, mais pas pour le visage.
Cette photo avait pour but d’identifier un soi-disant gendarme qui s’était présenté chez les Méline pour demander des renseignements. Personne n’a jamais reparlé de ces photos dans des lettres ou des appels anonymes. A la suite de cette affaire, Jacky et Liliane m’en ont voulu parce que je les avais accusés auprès des gendarmes de Corcieux. En soir, ils sont revenus tous les deux pour réclamer la photo en disant que je les avais trahis. Je le leur ai remis et leur ai montré en même temps la lettre anonyme que nous avions reçue à la suite de la soirée choucroute qui s’était déroulée chez eux. Je lui ai en même temps dit que j’étais sûr que c’était lui qui avait cassé la porte. Il a été surpris. Pendant ce temps, sa femme lisait la lettre anonyme.
Elle la lisait si vite qu’on aurait pu croire qu’elle la connaissait déjà. Je me suis empoigné avec Jacky, qui s’est laissé faire. A la suite de cette altercation, nous ne nous sommes plus fréquentés jusque maintenant et nous n’avons plus reçu, ni les uns ni les autres, d’appels ou de lettres anonymes. Mais il est possible que Michel ait reçu deux appels silencieux pendant cette période.
S.I. : Je n’ai organisé qu’une seule soirée fondue chez moi à laquelle ils ont été invités. Je parle toujours de Jacky et Liliane. Je vous ai dit qu’il n’y avait qu’eux mais en fait il est possible que Bernard Noël et sa femme aient également été invités.
Cette soirée a été très sympathique. Le Jacky était bien éméché et il n’a pas le vin triste. En revanche, son épouse était très maussade.
Il n’y a, à ma connaissance, pas eu de coups de téléphone à la suite de cette soirée.
En ce qui concerne la soirée choucroute organisée par le Jacky, je me souviens qu’elle s’est terminée par des larmes. Elle était bien préparée, elle avait bien commencé. Puis il y a eu des piques au cours de la conversation et l’ambiance s’est détériorée. A un moment, le Jacky est tombé de sa chaise parce qu’il était encore ivre. Liliane s’est précipitée pour savoir s’il ne s’était pas fait mal et son père a dit :
« T’en fais pas pour lui, il y a du pot que pour les crapules ». Ma belle-sœur Liliane a été mal à l’aise tout au long de cette soirée. Elle se sentait jugée et le climat est devenu très tendu. A un moment, elle s’est mise à pleurer quand mon père est parti.
Puis ma mère est descendue également.
Quand nous nous sommes retrouvés tous les quatre, mon épouse, Jacky, Liliane et moi, nous avons discuté de notre projet de photo que je viens de vous évoquer.
Liliane pleurait et je l’ai consolée en lui disant que qu’on était sur le bon chemin et qu’on trouverait qui nous embêtait. Son chagrin me paraissait sincère, réel. Puis nous sommes partis. Cette soirée s’est passée un samedi soir et je crois que nous avons reçu la lettre anonyme le mardi matin. Elle était adressée à mes parents et avait été postée à Bruyères. En fait, quand on regarde le calendrier de l’année dernière, on se rend compte que le 17/5/83 était un mardi donc nous l’avons reçue un mercredi.
Puisque vous me relisez cette lettre, je vais vous vous expliquer comment je la comprends : « Je vois que rien a changé chez vous. Il y en a toujours que pour les mêmes et le chef vient toujours ». Je pense qu’il s’agit d’une personne qui me surveille dans mes déplacements, soit d’une personne d’Aumontzey qui est mesure d’observer la maison de mes parents et de voir que nous nous rendons régulièrement chez eux. « Vous pourrez montrer l’autre lettre et celle-là à Jacky car j’arrête ». Lorsque ma mère a reçu la première lettre, je lui ai dit de ne surtout pas en parler à la Liliane et au Jacky. Les autres étaient déjà au courant. Je veux dire Michel et sa femme, Gilbert et sa femme, mes parents et nous.
Je ne pense pas que Bernard et Jacqueline en avaient eu connaissance. Je vois deux solutions : soit Liliane que je soupçonnais être l’auteur de la première lettre et qui était venue le soir-même aux nouvelles, prêche de cette façon le faux pour savoir le vrai, soit l’auteur de la lettre savait ou a su que nous avions décidé en famille de mettre volontairement Jacky et Liliane à l’écart de cette lettre.
Je voudrais, avant de continuer, souligner une chose importante dont je me rappelle : pendant toute une période, Jacky et Liliane ne nous ont plus fréquentés mais ils allaient régulièrement chez Yvette Cunin à Aumontzey, une des sœurs de ma mère que celle-ci voit assez régulièrement parce qu’entretenant de bons rapports avec elle. N'étant pas tous les jours à Aumontzey, je ne peux pas vous dire si elles se voient plusieurs fois par semaine ou moins souvent. Les phrases qui suivent montrent que la personne est bien au courant de notre situation familiale et de nos conversations.
En ce qui concerne l'expression « Le droit de salir vos assiettes le dimanche », je sais que Liliane s'est plainte auprès de plusieurs personnes, et sans doute l’Yvette Cunin, de ne pas être assez souvent invitée chez mes parents. « Et le petit con de Granges, il n'est pas une journée sans descendre chez vous et il faut toujours qu’il mette son grain de sel partout quand il devrait fermer sa grande gueule mais pas d'effet » (grande gueule et effet étant des mots soulignée de deux traits). Je souligne d'abord qu'encore une fois, l'auteur fait allusion à ma possibilité d'observer la maison de mes parents. « Le petit con de Granges » est mon frère Gilbert. Je me souviens qu'un jour, dans cette période où nous étions beaucoup embêtés par ces appels anonymes, il s’est trouvé chez Jacky alors que celui-ci recevait un appel. Il est ensuite aussitôt descendu à Aumontzey pour voir mes parents. Ceux-ci n’étaient pas là, il est alors présenté chez Michel où ils étaient. Là, mon frère accompagné de sa femme, devant toutes les personnes présentes, (Michel et sa femme, mon père et ma mère et peut-être Bernard et Jacqueline), il a pris la défense de Jacky, en disant qu’il fallait arrêter de le soupçonner et en expliquant qu’il s’était trouvé avec lui au moment de l’appel. Il a parlé d'une voix déterminée et forte et Michel ou sa femme s’est fâché. Mon père a été très marqué par cette intervention, se sentant visé par les propos de Gilbert. Il a quitté la maison en pleurs et est allé prendre l'air pour se calmer, à l'extérieur, près de la maison à ruches.
Je dois vous dire que mon père est quelqu'un de très émotif qui manque d'assurance. Il est très doux et rejette toutes les situations d'agressivité. Je n'ai vraiment compris et apprécié à sa juste valeur mon père que lorsque j'ai quitté la maison familiale. Je crois que la rivalité entre mon père et Liliane vient du caractère très dur et très autoritaire de celle-ci. Ainsi que je l’ai déjà dit, celle-ci n'a pas froid aux yeux, elle est agressive dans son comportement. Peut-être parce qu'au fond d'elle-même, elle est très complexée et manque de confiance en elle. Cette différence de tempérament explique donc les conflits entre mon père et Liliane.
Les phrases suivantes font encore allusion au climat familial puis à l’état de santé moral et physique de mon père. Celui-ci était marqué par ces évènements. Il se souvient que son père s’est suicidé et il a déjà dit plusieurs fois qu'un jour il finirait comme lui. « Que le tout fou d’à côté arrête de frimer car il prend un coup de poing dans la gueule et il se sauve ». Je pense que, là, l'auteur de la lettre anonyme fait allusion à la bagarre qu'il y a eu à la filature entre Jacky et Michel. Michel avait commencé en donnant un coup de poing à Jacky mais ils ont été séparés aussitôt.
Après le travail, cependant, à la sortie de l'usine, Jacky a attendu Michel et lui a porté un coup de poing. Celui-ci n'a pas répliqué et est parti. Je sais notamment que
le Marcel Jacob a assisté à cette scène.
S.I. : Quand je repense à la lettre anonyme que nous avons reçue le jour du crime, je souligne que son auteur fait allusion à ma situation financière. Il y a un mois, j’ai effectivement bénéficié, comme je vous l’ai déjà dit, d'un prêt à un taux très avantageux. J’ai parlé de ce prêt à mes parents, à Gilbert et à sa femme, Jacqueline et son mari. Tous ceux-ci ont été mis au courant assez tôt, il y a environ trois ou
quatre semaines. En revanche, Michel n'a été mis au courant que dimanche dernier, quand il est venu prendre l'apéritif chez moi le matin. Sa femme l'accompagnait. Ce sont les seules personnes auxquelles j’ai, en dernier, parlé de mon prêt.
S.I. : Je connais à Aumontzey une autre personne avec laquelle nous sommes en conflit. Il s'agit d'Alain Noel qui vit seul, je veux dire sans femme car il est divorcé, mais avec sa mère dans une maison à quelques dizaines de mètres de celle de mes parents. Ce gars travaille à la filature. Il ne fréquente pas mes parents car depuis de nombreuses années, il existe des histoires anciennes entre nous, des vols de lapins, je crois. Je me souviens qu'il y environ douze ans, j'ai eu un problème direct avec cette personne. Il avait un chien qu'il laissait en liberté et qui était venu déjà plusieurs fois chez nous tuer des poules. Un soir, je l'ai vu qui en avait tué trois. J'ai
pris ma carabine 9 mm et j'ai tiré sur le chien qui n'a été que blessé. Alain Noël est venu me voir pour montrer son désaccord, mais sans grande agressivité de sa part.
Il a un frère, Serge, qui a longtemps fréquenté Jacky et Liliane.
S.I. : Deux autres anecdotes me reviennent en mémoire au sujet du Marcel Jacob. La première concerne des faire-part de naissance. Quand Daniel, le dernier fils de mon frère Michel est né, celui-ci a oublié d'envoyer un faire-part à Marcel Jacob qui est un de ses collègues de travail et celui-ci n'a pas apprécié cet oubli. Quelques mois plus tard, mon fils Grégory est né et, pour réparer ce fait, je lui ai envoyé un faire-
part mais il ne nous a jamais répondu ni rendu visite. Le deuxième fait concerne ma promotion d'agent de maîtrise. C'est Michel qui l'a appris à Marcel Jacob que j'étais monté en grade. Celui-ci n'a jamais voulu le croire et il a fallu qu'il se renseigne auprès de Grandidier, un des ouvriers de mon entreprise, qui habitait alors Autmonzey, pour s'en assurer.
Le 18 octobre 1984 à 10 heures 30.
Lecture faite par moi de la déposition ci-dessus, j'y persiste et n'ai rien à y changer, à y ajouter ou à y retrancher.
Le témoin
Jean-Marie Villemin
HISTORIQUE
2024-10-21 19:29:39 -
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Document mis à jour.
2024-10-21 19:27:58 -
Dana:
Document mis à jour.
2024-10-21 19:27:45 -
Dana:
Document mis à jour.
2024-10-17 14:22:45 -
Dana:
Document mis à jour.
2024-10-17 13:49:36 -
Dana:
Document mis à jour.
2024-10-15 20:48:12 -
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Document mis à jour.
2024-10-15 20:44:38 -
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Document mis à jour.
2024-10-15 20:15:09 -
Dana:
Document mis à jour.
2024-10-15 19:55:53 -
Dana:
Document mis à jour.
2024-10-15 19:54:10 -
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PV ajouté.